Toute jeune, je savais que je ne serais pas douée pour être maman. En fait, je n'en ai jamais eu vraiment envie. Depuis toute petite, je sais que je ne suis pas très « enracinée » dans ma condition d'être humain. J'ai toujours eu l'impression de vivre en « observateur ». Très très jeune, je me cachais derrière les meubles pour observer les invités de mes parents. Je me levais, il faisait nuit, et je descendais quelques marches pour « écouter » la visite jouer aux cartes, rire, etc..Je ne vivais pas ma vie de petite fille. J'observais constamment les grands.
À 4 ans, je trouvais la vie plate, j'avais trop hâte de partir à l'école. Mes parents, à force de séduction auprès de la supérieure, ont réussi à me faire admettre un an d'avance, en externe au couvent des soeurs toutes de noir vêtues. Ah, là j,avais de quoi observer. J'en revenais pas de ce système. De la soeur avec son chapelet de bois qui pendait dans les plis de sa jupe. De ses souliers ronds, noirs, lacés. Je n'avais pas peur cependant. J'observais. Des lettres calligraphiées élégamment sur les cartons au dessus du tableau noir. De beaux a b c d tout ronds...Je me sentais comme dans un rêve où tout cela était irréel. Les plateaux contenant de petits verres de lait au chocolat pour nous. On payait avec des coupons de 5¢ achetés au début de la semaine.
Je n'ai aucun souvenir d'avoir écouté les consignes ou d'avoir fait des devoirs ou des examens. Je me souviens seulement que le premier bulletin de notes de ma vie me classait 1ère de ma classe à mon grand étonnement. Moyen buzz pour mes parents qui m'avaient eu bien trop tard dans la quarantaine. Comme ils étaient fiers de moi, compte tenu que j'étais plus jeune que mes collègues. Mais moi, je n'y comprenais absolument rien à ce système. Au fil des mois, j'ai`maintenu ma première place sans effort alors la soeur, histoire de me discipliner un peu, me faisait écrire sur un pupitre près d'elle, pour me forcer à améliorer ma calligraphie. J'écrivais mal avec ma petite plume et mon encrier. Je ve voyais pas la pertinence de l'esthétisme si l'orthographe y était. Je ne me forçais pas trop trop pour rentrer dans le rang. J'aimais lui tenir tête un peu. J'avais un certain pouvoir compte tenu de mes notes. J'apprenais doucement la vie.
Chez moi, je ne jouais pas beaucoup à la poupée. Je jouais plutôt au magasin, en étalant les bijoux de ma mère sur un petit bureau derrière lequel je m'installais avec une tablette et une estampe que mon père possédait à titre de juge de paix. J'en étampais un coup. J'étais gérante de ma bijouterie et les affaires allaient bon train. Je ne jouais pas à la mère pantoute.
Bon, tout ça pour dire que bien que j'adore mon fils unique, je trouve difficile d'être parent à cause de cette angoisse, cette inquiétude au ventre qui ne lâche pas vraiment. Même s'il a 30 ans aujourd'hui. Il cherche du financement pour un projet actuellement. Il n'obtient pas tout à fait ce qu'il cherche encore. Et moi qui ai envie de faire quelque chose pour lui mais en même temps, je me dis qu'à son âge, j'avais un mari, une maison, une hypothèque, un prêt auto et une carte de crédit, un enfant et beaucoup d'obligations. J'attends qu'il ai épuisé toutes ses ressources, qu'il ait fait le tour de toutes les éventualités. Je verrai. Je ne suis pas riche, loin de là mais je sais que je pourrais l'aider d'une façon ou d'une autre. Voilà..je ne peux pas me détacher de cette inquiétude alors que mes parents ne sont jamais intervenus dans ma vie financière dès que j'ai commencé à bosser. Une autre époque je crois...
Je reviens à cette angoisse du parent qui ne m'a jamais lâchée depuis sa naissance. Ça ramène sur terre...Oui, on donne la vie mais on perd l'insousciance. Et moi, je suis une femme qui aime la liberté. Alors, je l'ai vécu difficilement cet apprentissage d'être parent. Je crois que je vais m'en faire jusqu'à ma mort. Du souci. Pour ça que je n'ai ai pas eu plus qu'un. Et lui, il est comme moi. Il me dit qu'il n'en veut pas. Qu'il lui suffit d'avoir un filleul. Me surprend pas. À 12 ans, à sa demande, on lui a acheté un chien tout mignon. Au bout d'une semaine, il pleurait en me disant...maman, j'ai plus de vie, j'étouffe...je ne suis pas capable d'avoir un chien qui me suit partout, qui veut jouer...Je veux faire de la musique, il veut jouer, j'ai besoin d'être seul....On a donné le chien. Je comprenais ce sentiment d'oppression...
C'est mal vu de ne pas vouloir d'enfant. Ben moi, je comprends ça. Ma mère qui en a eu 6 et qui nous adorait, eh ben, elle n'en voulait pas elle non plus. Ma mère était une femme d'exception, qui nous a fait rire et qui était hors norme. Elle était grand maman 9 fois et nous ne l'avons jamais vue prendre un de ses petits enfants dans ses bras. Elle ne les a jamais vraiment gardés avant l'âge de 6 ou 7 ans. Et puis après....elle était attachante, recevante et adorable. Mais pas une femme à enfants alors...
Bon, je téléphone à mon fils tantôt....Il va sûrement me raconter ses déboires :-)..On verra....
Aude
Vous êtes probablement comme votre mère, qui a eu des enfants sans en vouloir et s'en est bien occupé quand même. Nul doute que vous avez dû faire la même chose pour votre fils. Je vous souhaite de devenir grand-mère, pour faire différent de votre mère cette fois. Pour vivre le plaisir de la petite enfance (car il y en a un et ça vaut la peine de le découvrir!) avec vos petits-enfants, loin de toute idée de devoir!
RépondreSupprimertest
RépondreSupprimerBonjour Femme libre..
RépondreSupprimerSûrement que ce doit être bien extraordinaire le statut de grand-maman :-) ..Je n'y compte pas trop cependant, vu le profil de mon fils un peu semblable au mien..
On ne sait jamais ce que la Vie nous réserve..
Au plaisir !
Aude
Belle histoire sombre et forte... qui finit bien.
RépondreSupprimerEn tout cas, elle résonne énormément dans mon esprit et, j'imagine, dans le cœur de beaucoup de gens ;)
séb h.
Et bien je comprends. Je n'en ai jamais voulu et n'en ai pas eu. J'ai 48 ans aujourd'hui et je me sens souvent un peu seule. Et puis je me demande bien à quoi peut bien servir ma vie et surtout à qui... . Parfois je me demande si j'aurais du... et puis je me demande, si j'avais la possibilité de recommencer, est-ce que j'en aurais ? Et toujours la réponse est non... C'est comme ça.
RépondreSupprimerBeau texte.
TS
J'avais pas vu la date du post... un peu en retard la madame. o)
RépondreSupprimer